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Vous avez sans doute vu ou au moins entendu parler de la nouvelle série Squid Game (오징어 게임 Ojingeo geim) sur Netflix qui est devenue numéro 1 de la plateforme très vite, ce qui fait de ce drama le premier drama le plus vu de la plateforme en si peu de temps. À rappeler un succès mondial précédent du cinéma sud-coréen, Space Sweepers, numéro 1 sur Netflix en février 2020.
Jouons !
La série commence avec une courte présentation des personnes en difficulté financière. Des problèmes universels qui existent partout et qui touchent chaque société, même celle du pays qui est synonyme du miracle économique. La vie des gens à découvert est un cercle vicieux : ils empruntent ou ils jouent de l’argent ce qui génère une dette encore plus grande.
Et soudainement, une solution incroyable arrive. Un monsieur élégant vous propose de résoudre vos problèmes grâce aux… jeux. Jouez et gagnez une grosse somme d’argent. Une proposition tentante pour quelqu’un qui est au pied du mur, même si un peu bizarre…
Ici, il faudrait faire référence au concept de Johan Huizinga, homo ludens (« l’être humain qui joue / qui s’amuse »), d’après lequel toute la réalité et chaque activité humaine peuvent être perçues à travers le prisme du jeu. L’esprit fonctionne différemment en jouant. De la perspective anthropologique, on pourrait dire que le jeu est, dans une certaine mesure, un carnaval pour l’esprit, période où toutes les règles et normes habituelles sont suspendues. Cela correspond également avec le béhaviorisme en termes de choix moraux : dans les situations extrêmes, l’individu réagit plus selon les choix du collectif que les siens. Dans le quatrième épisode, les joueurs sont mis à l’épreuve. Finalement, ils forment des groupes et deviennent ennemis. À rappeler la fameuse expérience de Stanford, menée par Philip Zimbardo en 1971…
La critique des inégalités socio-économiques
Squid Game contribue au discours sur la critique du capitalisme. À la suite du chemin tracé par Parasite (기생충 Gisaengchung, 2019) de Boong Joon-ho (봉준호 Bung Jun-ho), on découvre le revers de la médaille : le pays qui est devenu un symbole du succès économique, lui aussi, ne peut pas résoudre le problème des inégalités socio-économiques de la société sud-coréenne. De fait, l’univers présenté dans la série est post-orwellien.
La présence d’Ali Abdul, joué par Anupam Tripathi (joueur numéro 199), Pakistanais, introduit également le discours sur les immigrés en Corée du Sud et comment les Coréens les perçoivent. Récemment, c’est un sujet qui devient de plus en plus important dans ce pays.
Inspiration graphique et artistique de la série
Les escaliers
Comme vous l’aurez sans doute remarqué, les escaliers de Squid Game, très colorés (roses, verts, bleus), sont une fusion entre deux œuvres. La première est La Relativité de Maurits Cornelis Escher (1898-1972) qui représente des personnes anonymes exerçant une activité, s’affranchissant de toutes les lois de la gravité. Les personnages de la série sont à cette image. Ils portent tous le même uniforme, difficilement reconnaissable de loin et ils n’ont aucun élément distinctif.
La deuxième œuvre dont s’est inspiré Squid Game pour cette séquence, est l’œuvre nommée Le Mur rouge (La Muralla roja) par Ricardo Bofill, une construction moderne d’appartement qui se situe en Espagne.
V.I.P.
Graphiquement, les équipes de la série se sont inspirées d’un événement qui a vraiment eu lieu. Il s’agit du Bal des Rothschild. Le 12 décembre 1972, Marie-Hélène de Rothschild va organiser un bal costumé excentrique pour riches et personnalités influentes, durant lequel les costumes étaient vraiment originaux, hors du commun. Sur les photos que vous pouvez voir ci-dessus, vous pouvez apercevoir Madame Rothschild portant un masque de cerf qui pleure des larmes de diamants. Plutôt belle métaphore et belle mise en parallèle pour la série qui met en avant les personnes en difficulté financière.
Les VIP de la série sont tous des hommes. Lors des plans de la loge des V.I.P., on peut clairement apercevoir que les femmes sont reléguées au second plan, une façon aussi de dénoncer un patriarcat qui peut parfois s’avérer excessif. Puisque dans une scène, on retrouve une femme qui sert de mobilier, voir de repose-pieds pour l’un des V.I.P.
L’un des messages et morale, cachés derrière la scène où on retrouve des femmes servant de mobilier, est que l’argent et le pouvoir qu’il apporte avec lui, peut rendre l’être humain mauvais, orgueilleux, prétentieux, lui enlever son humanité et le pourrir de l’intérieur.
La scène du dîner
La table de la scène mythique du dîner entre les trois derniers participants forme un triangle. Et cela, ce n’est pas seulement parce qu’il reste uniquement trois participants. Cette mise en scène fait directement référence à l’œuvre de Judy Chicago, nommée The Dinner Party, considérée aujourd’hui comme étant la première œuvre féministe épique.
Une installation constituée de 39 tables à manger, dressées jointes les unes aux autres et disposées en triangle, chaque table représente une figure historique féminine, soit des divinités féminines, soit des femmes importantes de l’histoire. On retrouve lors de ce dîner la joueuse numéro 067, Kang Sae-byeok (강새벽), interprétée par l’actrice Jung Ho-yeon (정호연 Jeon Ho-yeon), qui est en train de se vider de son sang à cause d’un morceau de verre lui ayant perforé le ventre, ce qui laisse le spectateur comprendre clairement qu’elle ne fera plus partie de l’aventure et qu’elle laissera sa place aux deux autres joueurs qui restent.
Du virtuel uniquement quand c’est nécessaire
La série a demandé énormément de travail manuel, autant pour les artistes que décorateurs sur le plateau. Contrairement à des séries comme Loki the Mandalorian, Squid Game, quant à lui, est entièrement en décors réels. La série comporte très peu d’éléments virtuels ou même d’effets en postproduction. Bien-sûr, une des pratiques utilisées et le set extension qui consiste à qu’on se voit en réel, tout ce qui va avoir une interaction avec les comédiens, là où ils vont marcher, ce qu’ils vont toucher, et tout ce qui n’a pas besoin d’interaction, va être ajouté en postproduction et tourné sur fond vert ou sur fond bleu.
Par exemple, la scène du tir à la corde est réelle. Seul petit détail, c’est que les acteurs ne tombent que d’un mètre, pas 50, et ne meurent pas à la fin du jeu. De plus, les comédiens sur le plateau n’avaient aucune équipe de doublure cascade. C’est quelque chose qui n’arrive quasiment jamais. Les acteurs ont donc dû vraiment faire leur cascade, vraiment se mettre dans la peau de leurs personnages à 100 % et cela se retrouve à l’image ; cela se ressent lorsque l’on regarde la série.
Netflix et ses investissements
L’événement Squid Game de Netflix va être un tournant pour l’industrie du divertissement mondial. Depuis 2016, Netflix a signé un contrat avec la Corée du Sud pour la création de contenu original. Et très récemment en 2021, Netflix annonce un investissement de plus de 500 million de dollars en Corée, les équipements coréens et les productions coréennes, pour produire du contenu en Corée.
Netflix a un grand besoin de diversifier son offre. Et ce contrat avec la Corée peut lui permettre d’y arriver. Ces dernières années, le contenu et l’industrie du divertissement coréen s’est grandement internationalisé. Parasite, Blackpink, BTS, Mademoiselle, Okja, Sweet home. Est-ce que d’ici quelques années, la Corée ne deviendra pas à l’instar des États-Unis le nouveau pays à blockbuster et aux productions à succès international ?
Comme vous l’avez sans doute vu passer sur Twitter ou les réseaux sociaux, Netflix a investi la station de métro Itaewon en Corée du Sud, ce qui contribue à la promotion de la série et également à prolonger son succès.
étudiant en design graphique et design industriel, passionné par la Corée sur toutes ses formes. et nous vous faisons découvrir ce pays merveilleux et sa culture chaque semaine.
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