Sommaire
- Les croyances folkloriques
- Bestiaire coréen
- Gwisin, fantômes
- Mamul, monstre
- Dokkaebi, goblin
- Gumiho, renarde à neuf queues
- Noguhwaho, renarde ou femme plus âgée
- Jeoseung saja, faucheur
- Geogugwi, monstre à grande bouche
- Gwisusan, tortue-montagne
- Bulgae, chien de feu
- Dongjasam, mandragore-enfant
- Pyepye, renard à ailes d’oie
- Geumdwaeji, cochon en or
- Myodusa, chat-serpent
- Inmyeonjo, oiseau-humain
- Folklore moderne
- Addenda
- Bibliographie
- Illustrations
Dans nos articles, nous avons déjà parlé des êtres surnaturels coréens ainsi que des phénomènes paranormaux dans le contexte des légendes urbaines. Cette fois-ci, nous vous proposons une introduction générale, mais plus approfondie et complète, à l’univers des créatures fantastiques du folklore coréen.
Les croyances folkloriques
Parler du folklore et ses croyances, c’est parler principalement de l’invisible et la spiritualité, manifestés dans des pratiques culturelles et artefacts variés.
Les croyances folkloriques possèdent un caractère archétypique. Elles préservent les plus anciens éléments de la culture (comme les peurs primales, expliquées souvent sous forme de mythe) qui renvoient aux origines du monde, à arkhè (ἀρχή arkhḗ) qui est « la précause » ou le commencement de tout d’après l’ancienne philosophie grecque :
[Les archétypes] ce sont des figures universelles et intemporelles qui émergent, lorsque les conditions le permettent, dans les différentes cultures. Celles-ci se les réapproprient ensuite en fonction de leurs spécificités pour s’en enrichir et les magnifier par l’imagination. Ces fictions ainsi élaborées à partir d’une semence du monde du sens, enrobées dans les systèmes de croyances des peuples et des individus, deviennent opératives et produisent l’histoire.
Bigé, 2020, p. 46
Les croyances folklorique se caractérisent aussi par la variabilité du contenu et de la forme. C’est la raison pour laquelle on tombe sur plusieurs versions du même mythe ou de la même légende, plusieurs représentations de la même déité, créature fantastique etc. Elles varient selons les régions et dans certains cas, selon les époques.
Les sources du folklore coréen
Malgré la renaissance des recherches sur le folklore coréen en Corée du Sud, il manque toujours des publications suffisament profondes pour expliquer ce phénomène, surtout les personnages folkloriques. Contrairement aux cas de la Chine, du Japon avec leurs fameux yōkai (妖怪), et même de Taïwan, il n’existe pas un ouvrage complet qui présenterait le panthéon folklorique coréen.
Le folklore traditionnel coréen (à ne pas confondre avec le folklore stylisé ou le folklore moderne dite folkloresque) est une fusion des éléments chamaniques (sibériens y compris), bouddhistes et de différentes pratiques religieuses d’origine chinoise. Cet ensemble unique donna naissance à de nombreux êtres surnaturels qui habitèrent l’esprit collectif des Coréens pendant des siècles.
Bestiaire coréen
Même si les croyances folkloriques coréennes s’enchaînent naturellement avec les rites officiels à la cour royale, il existe certaines différences entre les personnages folkloriques et les créatures légendaires comme haetae (해태) ou quatre gardiens de la Corée.
Cet univers est vaste et infini à la suite des transformations internes permanentes. Ces « osmoses » au niveau des caractéristiques, des représentations iconographiques ou encore des rôles atrribués par la communauté, permettent de garder son dynamisme ainsi que maintenir sa richesse symbolique.
Certains êtres proviennent de Chine où ils ont été présentés dans le Livre des monts et des mers (山海經 Shānhǎijīng), appelé aussi Classique des montagnes et des mers. C’est un receuil de données légendaires sur la géographie et les créatures fantastiques, compilé entre la période des Royaumes combattants (Vème-IIIème siècle) et la dynastie Han (206 avant notre ère – 220) en Chine. L’ouvrage devint une source de connaissance imporante à l’époque, comparable au Livre des merveilles du monde (1355-1357) de Jean de Mandeville, et à des bestiaires médiévaux variés en Europe.
Gwisin, fantômes
Les gwisin (귀신 ; hanja : 鬼神) désignent les êtres connus en Occident sous le terme des fantômes. Dans la version hanja, le caractère 鬼 signifie « un fantôme » ou « un démon », et 神 dénote tout ce qui concerne la divinité, mais aussi « une âme » et « un esprit ». Traditionnellement, il s’agit des fantômes issus des défunts. Leurs apparences varient conformément à leurs histoires et aux circonstances de la mort.
Si un gwisin ne peut pas partir de la terre, il vagabonde ou il s’installe quelque part à la recherche de la nourriture car même en tant qu’être spirituel, il doit manger. Alors, il est essentiel de tenir le rituel de jesa (제사) en mémoire des défunts.
D’habitude, les gwisin sont méchants et ils posent des problèmes aux vivants. En outre, ils peuvent être vraiment dangeureux, surtout des esprits vengeurs comme wonhan (원한 ; 怨恨) ou des fantômes vierges qui s’appellent chonyo gwisin (처녀귀신 ; 處女鬼神).
Dans l’ancienne Corée, les gens eurent des pratiques différentes pour se protéger contre ces êtres. Parmi lesquelles, jeter du sel devant la porte ou accrocher un tamis au-dessus de l’entrée à la maison. On croyait que le sel était comme une amulette pour chasser des pouvoirs maléfiques et le tamis permettait de distraire les gwisin. Un fantôme une fois venu au seuil de la maison, commença à… compter des trous du tamis au lieu d’entrer.
Le sixième jour du premier mois lunaire tombe le Gwisinnal (귀신날 ; 鬼神날), le jour ou la fête des fantômes. Il est célébré dans le cadre du Seollal (설날), Nouvel An Coréen.
Il arrive d’identifier les gwisin avec les yogwi (요괴 ; 妖怪), avec les mamul (마물 ; 魔物), ou encore les mangheun (망흔). Pourant, le terme yogwi et sa version en hanja fonctionne comme un équivalent des yōkai (妖怪) japonais et des yāoguài chinois (妖怪). Quant aux mamul, il s’agit plutôt des monstres démoniaques, toujours associés au mal.
Aujourd’hui, on trouve de nombreuses réinterprétations des gwisin dans la culture populaire, notamment au cinéma. Parmi lesquelles, les films d’horreur ou les séries télévisées, par exemple Hotel del Luna (호텔 델루나 Hotel delluna, 2019) qui a reconstruit l’image des fantômes en Corée du Sud, ou encore The Tale of Arang / Arang and the Magistrate (아랑사또전 Arangsattojeon, 2012).
Yagwanggwi, fantôme de chaussures
Le yagwanggwi (야광귀 ; 夜光鬼) est « un fantôme lumineux », parfois appelé aussi sinbal gwisin (신발귀신)1 ce qui signifie « un fantôme de chaussures ». Il vient aux villages le premier jour du Seollal, la veille ou après la première pleine lune du premier mois lunaire. Il met des chaussures des habitants (à rappeler que dans l’ancienne Corée les chaussures furent laissées devant l’entrée à la maison) et si jamais la taille est bonne, le propriétaire des chaussures sera malchanceux, ou il pourra même mourir.
Pour éviter le malheur, on pratique le yagwanggwi jjotgi (야광귀쫓기 ; 夜光鬼쫓기). Il faut accrocher un tamis au-dessus de la porte, brûler une mèche de cheveux et disperser les cendres dans la cour.
Mul gwisin, fantôme noyé
Le mul gwisin (물귀신) est habituellement une âme noyée dans les eaux, âme de quelqu’un qui était mort par noyade. Il vient hanter les pêcheurs. Selon les croyances folkloriques, il ne faut pas toucher le cadavre parce qu’il est probable d’être entraîné par son âme.
Les mul gwisin passent pour particulièrement effrayants à cause de leur origine. Ils évoquent l’une des peurs primordiales dans la culture coréenne, qui est la peur de l’eau. Cette aquaphobie, au sens propre et figuré, peut être expliquée par le fait que pour un pays péninsulaire, l’eau en tant que force de la nature et l’un de quatre éléments qui composent l’univers, fut un vrai défi. De plus, à l’ère préindustrielle, les inondations restèrent un danger permanent.
Pour autant, dans une série sud-coréenne The Bride of Habaek (하백의 신부 Habaekui shinbu, 2017), Habaek (하백) a été reconnu par l’un des personnages principaux comme un mul gwisin malgré son identité divine. Cette réinterpétation n’a aucun lien avec la noyade.
Chonyo gwisin, fantôme vierge
Le chonyo gwisin (처녀귀신 ; 處女鬼神) est une âme d’une femme non-mariée, dit « un fantôme vierge ». Dans l’ancienne Corée, notamment à l’époque de Joseon (1392-1910), où le mariage fut essentiel pour une femme afin de mener une vie respectueuse, la mort avant le mariage fut tragique.
Si une femme meurt avant son mariage et sa consommation, son âme ne reste pas en paix. Elle vagabonde et cherche vengeance. Elle porte un sobok (소복 ; 素服), vêtement de deuil traditionnel en couleur blanche.
Pour résoudre le problème, un rite de yonghon gyeolhonsik (영혼결혼식 ; 靈魂結婚式) fut introduit. Il s’agit du mariage posthume, une cérémonie de mariage pour les âmes pour accomplir l’union conjugale.
On trouve des fantômes vierges dans les séries contemporaines, comme déjà mentionnées Hotel del Luna et The Tale of Arang.
Mongdal gwisin, fantôme vierge masculin
Le mongdal gwisin (몽달귀신), connu aussi sous le nom du chonggak gwisin (총각귀신 ; 總角鬼神), est un équivalent masculin du fantôme vierge. Il apparaît moins souvent que le chonyo gwisin.
D’après la légende, Hwang Jin-i (황진이 ; 黃眞伊, 1506-1560), fameuse gisaeng (기생 ; 妓生) à l’époque de Joseon, fut hantée par un mongdal gwisin. Avant de devenir une courtisane, elle tomba amoureuse d’un jeune homme, Sang-yeo (상여). C’était l’amour réciproque. Malheureusement, face à la mort subite du célibataire, Hwang Jin-i ne pouvait pas le marier, et lui, il chercha une consolation.
Dalgyal gwisin, fantôme-œuf
Le dalgyal gwisin (달걀귀신) est un fantôme particulier. Son nom qui signifie littéralement « un fantôme-œuf » vient du fait que sa tête ressemble à l’œuf car elle n’a aucunes parties du visage.
Si quelqu’un rencontre un dalgyal gwisin, il mourira bientôt. Selon certaines interpétations, les dalgyal gwisin sont un genre de mujagwi (무자귀 ; 無子鬼), fantômes sans enfants ou d’autres descendants, sans personnes qui pourraient tenir un rituel commémoratif pour eux.
Wonhan, esprit vengeur
Le wonhan (원한 ; 怨恨) est un esprit vengeur, une âme qui garde rancune à un vivant. Dans son nom, on trouve le mot han et le caractère 恨 dans sa version hanja, le même que dans le cas du han (한 ; 恨), concept philosophique et esthétique coréen qui désigne un genre de sentiment, émotion ou état d’esprit se positionnant entre le ressentiment, la tristesse, le regret et le chagrin.
Dans la série Hotel del Luna, les wonhan jouent un rôle plutôt important. On y trouve au moins quelques cas des esprits vengeurs autour desquels l’action se déroule.
Mujagwi, fantôme sans enfants
Le mujagwi (무자귀 ; 無子鬼) est un fantôme sans enfants. Il s’agit d’une âme du défunt qui n’a personne autorisé à tenir un rituel commémoratif pour elle. D’habitude, c’est le cas des gens qui étaient cruel lors de leur vie terrestre.
Mamul, monstre
Le mamul (마물 ; 魔物) est un monstre démoniaque ou dans le sens plus large, chaque être qu’on considère comme un monstre. Alors, des dragons géants déstructifs de la mythologie coréenne et chinoise pourraient passer pour des mamul.
Dokkaebi, goblin
Le dokkaebi (도깨비) est comparable au lutin ou goblin dans les croyances folkloriques européennes, et partiellement aux oni (鬼) japonais. De temps en temps, il ressemble à un petit démon ou diable qui aime bien faire des plaisanteries, mais aussi à un être humain. Il porte un hanbok (한복 ; 韓服) et un paeraengi (패랭이), chapeau des hommes venant du jungin (중인 ; 中人), classe moyenne à l’époque de Joseon.
Au vrai, il est un personnage d’une nature ambiguë. D’une part, il est méchant, nuisible voire dangeureux ; D’une autre part, il est gentil et utile. Tout dépend de son humeur et s’il est bien traité par les gens, ou d’autres êtres vivants, qu’il rencontre, il offre son aide. Il sait aussi fabriquer des objets magiques et transformer la matière. Il existe même un rituel spécial dédié aux goblins coréens, dokkaebi gut (도깨비굿).
Le titre coréen de la célèbre série sud-coréenne, Goblin (도깨비 Dokkaebi, 2016), vient du nom de ce personnage. Il paraît que l’image du dokkaebi présentée dans cette production est une reconstruction la plus crédible parmi toutes les réinterprétations contemporaines.
Gaksi dokkaebi, gobline
On trouve également une version féminine du dokkaebi qui s’appelle gaksi dokkaebi (각시도깨비) ou amdokkaebi (암도깨비). La « dokkaebine » est une belle femme séduisante et intelligente qui se met en couple avec un homme-humain. Si jamais son amant le déçoit, elle cherche vengeance à tout prix. Dans cet aspect-là, elle ressemble à la gumiho (구미호 ; 九尾狐).
Gumiho, renarde à neuf queues
La gumiho (구미호 ; 九尾狐) est une renarde à neuf queues qui vit mille ans, et qui sait se transformer en belles femmes pour séduire les hommes et les manger. Elle apparaît dans le folklore de tous les pays confucéens : jiŭwěihú (九尾狐) ou húlijīng (狐狸精) en Chine et kitsune (狐) au Japon. En coréen, il existe même un proverbe qui dit : toutes les gisaeng sont des renard(e)s. (기생은 모두 여우이다 Gisaengeun modu yeouida).
Les gumiho peuvent être chassées par un samjokgu (삼족구 ; 三目狗), chien à trois œils, avec la fonction du singu (신구 ; 神狗) dans les images du genre byeoksa (벽사 ; 辟邪), talismans contre les puissances maléfiques.
L’importance du renard
Les renards (여우 yeou) possèdent une symbolique particulière dans les croyances folkloriques coréennes. Il est probable que ces animaux foncionnèrent comme les animaux totémiques parmi les tribus sur la péninsule avant l’influcence chinoise. En plus de la gumiho, on y trouve aussi le maegu (매구), renard à fourrure blanche.
Les renards cachent une yeouiboju (여의보주) dans leur bouche, c’est-à-dire le chintamani, pierre précieuse qui accomplit les souhaits selon la tradition bouddhiste. Ce joyau garde les pouvoirs du renard, entre autres la connaissance magique, les capacités de guérison et gagner des âmes.
Noguhwaho, renarde ou femme plus âgée
La noguhwaho (노구화호 ; 老嫗化狐) est encore une autre manifestation d’une « renarde fatale ». Pourtant, elle apparaît parfois dans le corps d’une vraie femme plus âgée ou comme une demi-renarde et demi-chatte.
Jeoseung saja, faucheur
Le jeoseung saja (저승 사자), connu aussi sous le terme du sasin (사신 ; 死神), est un équivalent de la Mort ou de la Faucheuse occidentale. Cependant, il n’est pas responsable de la mort, il doit seulement amener l’âme vers l’au-delà.
Quand il ne travaille pas, il se repose et cherche à manger. Si quelqu’un l’accueille chez soi, il sera reconnaissant et il pourra aider cette personne un jour.
Geogugwi, monstre à grande bouche
Le geogugwi (거구귀 ; 巨口鬼) est un monstre à grande bouche, voire géante d’origine bouddhiste. Le maxillaire supérieur touche le ciel et le maxillaire inférieur touche la terre. Malgré son apparence terrifiante, il est plutôt doux et il peut se transformer en beau garçon innocent. Pourtant, il faut faire attention car après être entré dans sa bouche par hasard, la morte est certaine.
Gwisusan, tortue-montagne
Le gwisusan (귀수산 ; 龜首山) est une énorme tortue qui porte sur sa carapace une montagne avec un bambou magique, et qui traverse les océans et les mers. D’après la légende, le roi Sinmun (신문왕 Sinmun Wang) du royaume Silla (57 avant notre ère – 935) remarqua une île particulière sur la mer. Le bambou qui s’y trouvait attira le roi et grâce à l’aide d’un dragon, qui apparut comme un deus ex machina, il l’obtint. Une flûte fut fabriquée à base du bambou, manpasikjeok (만파식적 ; 萬波息笛), qui devint après la flûte de la paix et prospérité.
Bulgae, chien de feu
Le bulgae (불개) est un chien de feu qui cherchait de la lumière pour le royaume souterrain. Il fut censé manger le soleil ou la lune et ensuite, l’amener au royaume. Mais comme il ne pouvait ni les manger ni décrocher, il absorba uniquement leur lumière.
Dongjasam, mandragore-enfant
Le dongjasam (동자삼 ; 童子参) est partiellement un équivalent de la mandragore occidentale. Comme la racine du ginseng ressemble au corps humain, il est facile d’imaginer comment elle bouge et commence à vivre sa vie.
Le dongjasam est « un enfant-mandragore » ou encore « un enfant-ginseng ». Il apparaît dans une histoire sur la piété filiale où un enfant sacrifie sa vie pour sauver ses parents et devient ainsi un dongjasam.
Pyepye, renard à ailes d’oie
Le pyepye (폐폐) est un renard (parfois un chien) à ailes d’oie. Il habite une montagne déboisée qui s’appelle Gobong (고봉) où il pousse… de l’or. Il annonce le cours des évènements qui arriveront dans l’avenir.
Geumdwaeji, cochon en or
Le geumdwaeji (금돼지) est un cochon en or qui sait se transformer en être humain. En tant que divinité déchue, il possède des pouvoirs magiques, mais il est également… cannibale.
Pour autant, aujourd’hui on trouve des objets comme portes-clefs ou figurines en forme du geumdwaeji, considérés comme les porte-bonheur.
Myodusa, chat-serpent
Le myodusa (묘두사 ; 猫頭蛇) est un chat-serpent qui habita le temple Songdo (송도) à l’époque et aida aux gens qui cherchèrent une consolation.
Inmyeonjo, oiseau-humain
L’inmyeonjo (인면조 ; 人面鳥) ou encore l’indujosu (인두조수 ; 人頭鳥獸) est un être à tête humaine et à corps d’oiseau qui apporte soit le malheur, soit le bonheur. Selon certaines légendes, c’est la seule créature qui puisse affronter une attaque d’un dragon.
Folklore moderne
Toutes les réinterprétations du folklore traditionnel constituent le folklore moderne. Quant au dernier, il fonctionne en tant que folkloresque, le phénomène où les éléments folkloriques sont sortis de leur contexte original, transformés, modifiés et après remis dans un autre contexte où ils obtiennent des nouvelles fonctions ainsi qu’une nouvelle symbolique.
Cela donne naissance également à des personnages « folkloriques » complètement nouveaux comme jangsanbeom (장산범). Il s’agit du fantôme d’un soldat mort lors de la Seconde guerre mondiale, vu pour la première fois en 2003. Il est dit qu’il a deux pattes de tigre et deux pattes d’ours ; qu’il vit seulement dans les montagnes ; qu’il se déplace à la vitesse de l’éclair ; que c’est impossible de voir son visage. Il entre doucement dans la culture populaire sud-coréenne, par exemple dans certains webtoons (Language of the Gods / 신의 언어 Sinui eoneo) ou jeux (Cookie Run: Kingdom / 쿠키런: 킹덤 Kukireon: kingdeom).
Semblablement au cas des légendes urbaines, le folklore en soi ainsi que sa réception, est un phénomène dynamique. Il renvoie à l’univers lointain, archaïque, mystérieux ; il renvoie au berceau de l’esprit. Selon Rudolf Otto (1869-1937), théologien allemand, c’est le besoin du numinosum, « l’aspect irrationnel de l’expérience religieuse, de toute émotion religieuse fortement ressentie » ; le besoin du « mysterium tremendum et fascinans : la terreur qu’il inspire, et qui ne peut naître de rien de terrestre, de connu, est accompagnée d’un désir d’Absolu éprouvé avec une force telle qu’il est impossible de s’y soustraire ». (Vicens-Pujol, 2018) À la fin, on revient toujours aux sources avec les mêmes questions que Paul Gauguin avec son tableau remarquable : D’où venons nous ? Que sommes nous ? Où allons nous… ?
Addenda
- 1Dans le cas des noms d’origine native, non sino-coréenne, on n’écrit pas la version en hanja. Cependant, il existe les versions où les mots d’origine sino-coréenne sont écrits dans les caractères chinois, et ceux d’origine native en hangeul, les suffixes grammaticaux y compris.
Bibliographie
- Bigé Luc (2020). Carl Gustav Jung – Portrait céleste. Pensée Jungienne et lecture astrologique. Paris : Éditions Dervy.
- Vicens-Pujol Carlota (2018). « Le paysage et l’expérience du numineux dans les récits autobiographiques de George Sand », Studi Francesi [Online], 184 (LXII | I) | 2018.
Illustrations
- Image liminaire : Bulgae (불개), représentation contemporaine
- ill. 1. Des pages du Livre des monts et des mers (山海經 Shānhǎijīng)
- ill. 2. Un vieux tamis accroché au-dessus de la porte pour distraire les gwisin
- ill. 3. Yagwanggwi (야광귀 ; 夜光鬼), graphique contemporaine
- ill. 4. La pratique du yagwanggwijjotgi (야광귀쫓기 ; 夜光鬼쫓기)
- ill. 5. Mul gwisin (물귀신), graphique contemporaine
- ill. 6. Chonyo gwisin (처녀귀신 ; 處女鬼神), représentation dans la manhwa (만화 ; 漫畵)
- ill. 7. L’une des parties du yonghon gyeolhonsik (영혼결혼식 ; 靈魂結婚式)
- ill. 8. Mongdal gwisin (몽달귀신), graphique contemporaine
- ill. 9. Dalgyal gwisin (달걀귀신), graphique contemporaine
- ill. 10. Des poignées de porte en forme de têtes des dokkaebi (도깨비), représentation traditionnelle
- ill. 11. Gaksi dokkaebi (각시도깨비), graphique contemporaine
- ill. 12. Gumiho (구미호 ; 九尾狐), graphique contemporaine
- ill. 13. Noguhwaho (노구화호 ; 老嫗化狐), représentation traditionnelle
- ill. 14. Jeoseung saja (저승 사자), graphique contemporaine
- ill. 15. Geogugwi (거구귀 ; 巨口鬼), représentation traditionnelle
- ill. 16. Geogugwi (거구귀 ; 巨口鬼), graphique contemporaine
- ill. 17. Gwisusan (귀수산 ; 龜首山), graphique contemporaine
- ill. 18. Bulgae (불개), graphique contemporaine
- ill. 19. Dongjasam (동자삼 ; 童子参), graphique contemporaine
- ill. 20. Pyepye (폐폐), représentation traditionnelle
- ill. 21. Geumdwaeji (금돼지), graphique contemporaine
- ill. 22. Myodusa (묘두사 ; 猫頭蛇), graphique contemporaine
- ill. 23. Inmyeonjo (인면조 ; 人面鳥), représentation traditionnelle
Née en 1993, Polonaise. Diplômée d'une licence en cultures d'Extrême-Orient (Université Jagellon de Cracovie - Pologne, 2012-2015) et d'un master en Arts Libéraux (Université de Varsovie - Pologne, 2016-2018). Étudiante en master à la Faculté des Études Asiatiques à l'Université Jagellon de Cracovie depuis 2021. Fascinée par la civilisation confucéenne et par les interactions interculturelles. Collaboratrice avec Planète Corée depuis 2018.
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